Pour parodier Brutal Truth, les disques ultimes réclament des chroniques ultimes. De fait, ouvrons la boîte aux superlatifs et extirpons-en les plus massifs.
Un nom explicite, signifiant bien que le contenu sera difficile à avaler. Une pochette choquante, malsaine, dérangeante. Une musique barbare qui, plus d’une décade après son enregistrement, reste toujours aussi dévastatrice. Souvent, les genres extrêmes perdent de leur saveur avec le temps. C’est ce que notait au débotté Jean Xulembourg à l’écoute de Rio grande blood, des thrasheurs digitalisés Ministry. Comme on trouve toujours plus vulgaire / sexy / meilleur cycliste que soi, on rencontre évidemment toujours plus violent. En l’occurrence, nous n’avons pas rencontré, et Hardcore electronic techno n’a pas pris une ride.
Dans les années 80, les français de Morsüre avait trouvé le concept pour jouer plus vite que tous leurs concurrents : bloquer leur boîte à rythmes à fond. De nos jours, Mortician procède à peu près de même pour un résultat identique : ultracore. Brutalité, violence, démence. Le disque s’ouvre sur le sample d’un humain imitant un cheval (Noizecreator) et se conclue sur un écho éprouvant. Entre-temps, on aura été malmené au gré de 22 pans de pure dinguerie dont les tempi dépassent allégrement l’acceptable. On y rencontre dans ce mix des gens aussi dérangés que DJ Smurf (méchant Cockrot), notre ami italien Destroyer, plusieurs fois Noizecreator, et des bizarres tels Christ of Noize & D. Lagon (Loud bastard – ahahah !), Amiga Shock (grand grand Mass appel Madness – Napalm Death style) ou Burning Lazy Persons. Que dire sur cet assemblage ? Nous pourrions le dépeindre des pages durant si 1. nous n’étions pas assez sot pour deviner que vous vous en fichez complètement 2. d’autres ne l’avaient fait bien mieux que nous.
Entrons plutôt dans mécanique de la haine. Si d’aventure vous vous risquez sur ces pistes barbelées, vous y apprendrez comment tourner en ridicule et en musique ceux qui vous déplaisent. Nazenbluten procède de la sorte sur No soul guaranted, balançant des rires déments à la suite d’extraits, distordus, de chansons signées James Brown (le pauvre). UK Skull Fuck met la moquerie en branle sur La haine, soulignant chaque extrait polémique de roulements saturés forcenés. Sont ainsi copieusement conspués Johnny Cash (enfin, lui ou un de ses sbires déclarant ne pas fumer de marijuana) ou Edith Piaf (qui ne regrette rien). Attaquer les symboles et ne pas tirer sur les ambulances, on aime ça nous, à (Presque) Fameux. Bien sûr, comme nous sommes en France, tout se termine en chanson, en l’occurrence sur un sample hip hop où tourne la phrase Nique la police. La haine. Plus qu’une chanson, plus qu’un disque, un état d’esprit, une ambition.
Que dire d’autre au sujet de cette pièce maîtresse du chaos moderne ? Que si vous avez eu la chance de l’acquérir à l’époque, vous possédez aujourd’hui un disque qui a pris de la valeur. Au contraire de toutes les compilations 90, hardcore, transe ou acid, dont la plupart ne valent même pas le boîtier qui les protège, Hardcore electronic techno a, du fait de son inestimable qualité, vu sa cote grimper. Printemps 2010, on trouve quelques exemplaires entre 5 et 40€, selon l’état. C’est dingue, pas vrai ? Mais que veux-tu, ami jazzman, le prix s’oublie, la qualité reste...